Le Rebétiko, la musique populaire urbaine des Grecs

Le Rebétiko, c’est la musique populaire urbaine des Grecs depuis cent ans. C’est l’héritage culturel grec indubitable encore bien vivant au 21e siècle.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le genre musical traditionnel grec, le Rebétiko se trouve dans la liste du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO depuis 2017. Il a été connu à l’étranger notamment grâce à Elias Petropoulos (se disant antropologiste urbain) qui a écrit, dans les années 60, des livres sur les chansons et musiques rébétika. Au début en marge, le Rebétiko est un symbole puissant de l’identité et de l’idéologie grecques dans la tradition de la musique populaire grecque. Voici plus bas ce que je sais de ce genre de musique.

Le Rebétiko est partout aujourd’hui. C’est une musique que j’entends très souvent, lors de fêtes organisées par les jeunes. Ma fille est une fervente de ce genre de musique comme ses amis ayant appris les paroles de la bouche de leurs grands-parents. Je remarque que, depuis que je suis en Grèce (32 ans), les jeunes non seulement écoutent de la musique étrangère de leur époque (rock anglais et américain etc) mais aussi de la musique et des chansons grecques du Rebétiko qui relatent toute la rude histoire des Grecs du 20e siècle.

La genèse du Rébétiko. Le Rébétiko est une musique qui est apparue environ en 1912 à Constantinople (ou Istanbul). Elle a intégré les quartiers défavorisés des grandes agglomérations (commerciales et sociales) comme ceux de Volos, de Thessalonique et bien sûr d’Athènes etc.. avec l’arrivée en Grèce des réfugiés Grecs d’Asie Mineure en 1922, suite à la Catastrophe d’Asie Mineure à Smyrne (les Turcs brûlent entièrement la ville et fonde la ville d’Izmir). Dix ans plus tard, en 1932, ce genre de musique toujours joué avec un genre de tout petit bouzouki appelé Baglama, se retrouve surtout dans les ports grecs dont celui du Pirée. Les réfugiés se mêlent aux populations pauvres provenant de la campagne et des îles grecques. Le mélange de ces influences donnent un résultat musical particulièrement intéressant.

Les paroles du Rébétiko se réfèrent à la rude vie des ouvriers, des travailleurs grecs et de ceux qui étaient marginalisés vivant dans les quartiers pauvres de la capitale grecque. Le rébétiko est chanté et dansé dans les quartiers désaffectés du Pirée et on y parlait dans une langue argo paraissant incompréhensible, de douleurs spirituelles, de désirs inassouvis et de choses plus ou moins morales sous forme de sérénades rimées accompagnées du son métallique notamment d’instruments à cordes provenants des villes grecques côtières d’Asie Mineure (aujourd’hui turques). Plus particulièrement, on parlait d’illégalité, de prison, d’injustice sociale, de tueries, de hashish, de violence, d’amours perdues, d’alcool etc. Dans les années 20, en hiver, ces gens simples se retrouvaient, dans un café ou autre, assis sur des chaises ou parterre, autour d’un feu, en fumant le narguilé. Ils chantaient en improvisant vers et notes et certains dansaient le zeϊbékikο (danse solitaire circulaire).

Le maître du Rébétiko, Μarkos Vamvakaris. C’est un petit musicien de l’île de Syros, ayant eu une vie difficile avec sa famille sans ressources, qui s’est installé au Pirée pour y trouver du travail. C’est lui qui a introduit le bouzouki dans la musique populaire qu’est le Rebétiko. Entre 1932 et 1937, il a connu avec Yorgos Batis un succès notable dans tout le Pirée en faisant sortir quelques disques. Les tekkés (mot turc) ou lieu de repos sont pleins tous les soirs. Le problème est qu’à partir de 1937, avec l’arrivée du fascisme grec de Métaxas, les Rébets se trouvaient face à la censure.

Le rebétiko productif jusque dans les années 50. Vassilis Tsitsanis prend la relève après son admiration pour Markos Vamvakaris. Lui, ce n’est pas un “magas” comme disent les Grecs, autrement dit “ce mec qui sait et a tout vu de la vie”. C’est un musicien du centre de la Grèce. Il a essayé de survivre à la deuxième guerre mondiale particulièrement mortelle et a sorti le superbe morceau “Dimanche nuageux”. Une de ses chanteuses est Sotiria Bellou, célèbre non pas seulement pour son combat en tant que résistante pendant la guerre mais pour sa voix singulière et marquant le Rébétiko jusque dans années 50. Entre 1942 et 1952, le Rébétiko se fait connaître et il est bien accueilli par le public grec parce qu’il parle du mal intérieur des Grecs après une guerre mondiale catastrophique mais aussi une guerre civile qui a divisé les Grecs. En effet, la Grèce passa sous la sphère d’influence occidentale et les communistes étaient pourchassés.

Voyez plus bas des scènes du beau film “Rebétiko” de Costas Ferris de 1983 qui parle de la chanteuse Marika Ninou 

Le rebétiko oublié dans les années 60 et 70. On le néglige petit à petit car les influences musicales européennes occidentales et les notes orientales prennent le dessus dans la société grecque. Après les cruelles années de guerres civiles (après la seconde guerre mondiale) dûes à la guerre froide et suite à l’émigration des Grecs pauvres (en Amérique du Nord et en Allemagne), les gens ont besoin d’un peu de joie, de rires, d’insouciance et d’un feint luxe. Ils vont beaucoup au cinéma et un brin de rébétiko est entrevu avec Giorgos Zambetas. Ceci dit, on aime surtout Zambetas pour sa joie et son air satirique ouvert. Et puis, pendant la dictature. c’est le grand compositeur grec Mikis Théodorakis qui fait connaître le rebétiko partout à l’étranger.

Résumé : Le rebétiko a été chassé et interdit (surtout 1946-1956), sans raison à mon avis, car il n’a jamais eu de contenu politique. Finalement, il a été impossible d’éliminer une telle forme d’art puisque ses racines musicales sont prοfondément grecques. De plus, toutes les musiques semblables au rebétiko dans d’autres pays, comme par exemple le tango et le blues, ont été lentement incorporées par l’urbanisme de nombreuses années plus tard car elles expriment tout le mal intérieur de ceux qui souffrent des injustices sociales et politiques. Ces musiques de l’âme , au cours du temps, ont juste dû changer un peu leurs sujets pour être aimées par les nouvelles générations. En tout cas, le rebétiko a atteint la place qu’il mérite dans la société grecque, formant, avec toute autre musique populaire (musique démotique), les piliers  de soutien à la tradition musicale grecque parlant de vérité dans le cadre de la culture urbaine grecque. De surcroît, j’apprécie le rebétiko pour sa diversité, son côté ouvert à la liberté.

Aimez-vous ce genre de musique qu’est le rebétiko ?

Vous souhaitez en savoir plus ?

Et Recevoir ma Newsletter ?

Insérez votre Email ici :

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *